PLAN: La protection des salariés en cas de rupture du contrat de travail
Les cas de rupture de la relation de travail.
- Le licenciement.
- Le licenciement pour motif personnel.
- La démission.
Les dispositifs de protection des salariés.
- Les principes généraux et leur mise en oeuvre.
- Les mesures particulières entourant le licenciement collectif pour motif économique.
La protection supranationale des salariés.
SYNTHESE: La protection des salariés en cas de rupture du contrat de travail
L'adaptation de l'emploi aux évolutions professionnelles peut se traduire par une rupture du contrat de travail. En effet, l'employeur peut, dans le cadre de son pouvoir de direction, prendre la décision de rompre le contrat de travail du salarié en le licenciant, selon les circonstances, pour motif économique ou pour motif personnel. Dans ce cas, le législateur prévoit des dispositifs de protection à l'égard du salarié, sur le fond et sur la forme. Le salarié peut, de son côté, démissionner de son emploi.
Un accent est mis tout particulièrement depuis quelques années sur l'obligation de reclassement des salariés en cas de licenciement économique.
Les cas de rupture de la relation de travail.
Le licenciement
La notion de licenciement économique.
Le licenciement pour motif économique est décidé par l'employeur pour des motifs qui doivent, bien sûr, être réels et sérieux ainsi que non inhérents à la personne du salarié, résultat d'une suppression ou d'une transformation d'emploi, d'une modification d'un élément du contrat de travail refusée par le salarié, consécutive notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. La Cour de cassation a prévu d'autres cas de licenciement économique, comme la réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou la cessation d'activité de l'entreprise.
Les mesures de reclassement.
L'obligation de reclassement.
L'obligation de reclassement et d'adaptation s'impose avant toute mesure de licenciement. Des efforts de reclassement doivent avoir lieu sur un emploi relevant de la même catégorie ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord du salarié, sur un emploi de catégorie inférieure. L'employeur est tenu de rechercher les emplois compatibles avec les capacités professionnelles du salarié, y compris ceux qui seraient accessibles au prix d'une formation ou d'une adaptation du poste. Le reclassement doit être réalisé dans l'entreprise ou, le cas échéant, au sein du groupe. Les offres de reclassement doivent être écrites, individuelles et précises. S'il ne peut proposer de reclassement sérieux, l'employeur devra prouver cette impossibilité; faute de quoi, le licenciement sera considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le congé de reclassement.
Dans les entreprises ou groupes de 1 000 salariés ou plus, l'employeur doit proposer un congé de reclassement à chaque salarié susceptible d'être licencié pour motif économique. Dans les entreprises de moins de 1 000 salariés, une convention de reclassement personnalisé doit être proposée au cours de l'entretien préalable au licenciement.
Le plan de sauvegarde de l'emploi.
La loi de modernisation sociale de 2005 prévoit qu'un plan de sauvegarde de l'emploi doit être établi dans les entreprises d'au moins 50 salariés lorsque l'effectif à licencier porte sur 10 salariés au moins sur 30 jours. Le plan, dont le but est de limiter le nombre de licenciements, doit prévoir de nombreuses mesures (aménagement du temps de travail, mutations, formations, soutien à la création d'activité) tendant à reclasser les salariés concernés sur des postes équivalents.
Le licenciement pour motif personnel
La notion de licenciement pour faute.
Le licenciement pour faute, qui tient à la personne du salarié, doit être fondé sur un motif réel – c'est-à-dire objectif, les faits étant matériellement vérifiables – et sérieux – c'est-à-dire reposant sur des griefs suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat.
Il existe plusieurs degrés de gravité de la faute: la faute sérieuse, suffisamment grave pour justifier un licenciement; la faute grave, qui résulte de faits d'une importance telle que le salarié ne peut pas rester dans l'entreprise pendant le préavis; et enfin, la faute lourde, qui suppose l'intention de nuire à l'employeur.
Les juges saisis ont la possibilité d'apprécier l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, les deux parties fournissant leurs propres éléments de preuve. Le doute profite au salarié. Les sanctions du licenciement sans cause réelle et sérieuse varient en fonction de l'ancienneté et de la taille de l'entreprise.
Le licenciement sans faute (cas de l'insuffisance professionnelle).
Parfois, l'employeur peut licencier un salarié en dehors de toute faute mais pour un motif lié à la personne du salarié. L'employeur peut ainsi prononcer un licenciement fondé sur une inaptitude professionnelle du salarié (par exemple, l'inaptitude à exercer ses fonctions de manière satisfaisante). Il peut s'appuyer pour cela sur un dispositif d'évaluation professionnelle (entretien d'évaluation, notation).
Qu'il s'agisse d'insuffisance professionnelle ou d'insuffisance de résultat, il est indispensable que les éléments d'appréciation reposent sur des faits concrets. L'employeur doit en effet établir clairement l'insuffisance professionnelle résultant de l'incompétence du salarié, son manque d'efficacité, son manque d'autorité ou de motivation ou son inaptitude à exécuter de façon satisfaisante le travail. Les faits allégués par l'employeur doivent être vérifiés, car l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation de ses salariés à l'évolution de leur emploi. Les juges considèrent souvent que l'insuffisance professionnelle n'est pas une faute, sauf abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée du salarié.
La démission
La démission est la rupture du contrat de travail décidée à la seule initiative du salarié. Elle n'a pas à être motivée et se caractérise par l'existence d'une volonté claire et non équivoque, et l'absence de formalisme. Elle ne doit donc pas avoir été donnée sous la pression de l'employeur et doit s'exprimer librement. Le salarié doit respecter un préavis dont l'existence et la durée résultent des conventions et accords collectifs ou des usages.
La rupture conventionnelle.
Le législateur a instauré un nouveau mode de rupture du contrat de travail: la rupture conventionnelle (loi du 25 juin 2008 portant sur la modernisation du marché du travail), qui permet à l'employeur et au salarié de convenir en commun des conditions de la rupture du contrat. Cette rupture conventionnelle du contrat de travail obéit à une procédure spécifique: entretiens entre les deux parties, homologation de la convention.
Elle est entourée de garanties pour le salarié:
le salarié doit percevoir une indemnité minimale équivalente à l'indemnité légale de licenciement, dont le régime fiscal et social est celui des sommes versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail;
le salarié peut bénéficier de l'assurance-chômage. En principe, seuls ont accès à l'assurance-chômage les travailleurs involontairement privés d'emploi , ce qui n'est pas le cas des salariés dont le contrat est rompu d'un commun accord.
Par exception à ce principe, les salariés dont le contrat de travail est rompu en vertu des nouvelles dispositions du Code du travail peuvent bénéficier de l'assurance-chômage (articles L.5421-1 et L.5422-1 du Code du travail).
La procédure à respecter.
L'article L.1237-11 du Code du travail impose que la convention de rupture d'un commun accord soit écrite, signée par les parties au contrat et ait été précédée d'une procédure destinée à garantir la conclusion de cette convention de manière libre et éclairée.
La procédure se déroule ainsi:
un ou plusieurs entretiens doivent se tenir, au cours desquels le salarié peut se faire assister, dans les mêmes conditions que celles prévues pour l'entretien préalable à un licenciement. L'employeur peut se faire assister si et seulement si le salarié l'informe qu'il va l'être. L'employeur doit alors en informer le salarié et peut être assisté soit par une personne appartenant au personnel de l'entreprise, soit, dans les entreprises de moins de 50 salariés, par une personne appartenant à son organisation syndicale ou par un autre employeur relevant de la même branche d'activité;
La convention de rupture doit mentionner le montant de l'indemnité de rupture spécifique ainsi que la date de rupture du contrat de travail, qui ne pourra pas être fixée avant le lendemain du jour de l'homologation. L'administration a intégré la convention de rupture au modèle de demande d'homologation. Ce formulaire doit être rempli en trois exemplaires, un exemplaire revenant à chacune des parties, le troisième étant destiné à l'Administration aux fins d'homologation;
Chacune des parties dispose d'un délai de 15 jours calendaires, à compter de la signature de la convention, pour exercer son droit de rétractation, par lettre adressée par tout moyen. L'essentiel est de pouvoir prouver l'exercice de ce droit dans le délai imparti. En pratique, il est conseillé de se rétracter par lettre recommandée avec avis de réception;
L'homologation de la convention par l'autorité administrative est une condition de validité de la convention. À l'expiration du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d'homologation au Directeur Départemental du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle dont relève l'établissement où est employé le salarié, à laquelle est joint un exemplaire de la convention.
À réception de cette demande, l'Administration dispose d'un délai d'instruction de 15 jours ouvrables durant lequel le respect des conditions légales de conclusion de la convention est vérifié. Par ailleurs, l'Administration vérifie que les consentements des parties n'ont pas été viciés, par erreur, dol ou violence. À l'issue de ce délai, et en l'absence de réponse de l'Administration, l'homologation est réputée acquise.
Le contrôle judiciaire de la rupture conventionnelle.
Une fois la convention homologuée, expressément ou tacitement, le conseil de prud'hommes est seul compétent pour connaître de toutes contestations liées à cette rupture. Il est donc compétent pour apprécier la régularité de la convention de rupture d'un commun accord, mais également l'homologation ou le refus d'homologation opposé par l'autorité administrative. Un tel recours contentieux doit être porté devant le conseil de prud'hommes dans les 12 mois de la date d'homologation de la convention.
Les dispositifs de protection des salariés.
Les principes généraux et leur mise en oeuvre
Le respect du contradictoire et l'énonciation de la cause.
Avant toute décision, l'employeur doit convoquer le salarié par lettre recommandée, indiquant qu'un licenciement est envisagé. La lettre doit préciser la date, le lieu et l'heure de l'entretien, en rappelant au salarié qu'il peut se faire assister au cours de cet entretien d'une personne de son choix appartenant à l'entreprise.
Le respect du contradictoire se fait donc lors de l'entretien préalable, permettant aux deux parties de s'exprimer et d'échanger leurs arguments. Si, à l'issue de l'entretien, l'employeur décide de licencier le salarié, il doit lui notifier sa décision par lettre recommandée avec accusé de réception, au moins deux jours ouvrables après l'entretien préalable. Il s'agit en effet d'empêcher une décision trop hâtive. La lettre de licenciement énonce avec précision le motif du licenciement, c'est-à-dire la cause de la décision. Ce motif lie l'employeur, qui ne pourra ni modifier le motif ni le compléter par la suite.
Le délai de préavis.
Le délai-congé ou préavis de rupture est un délai de prévenance que doivent respecter les salariés et l'employeur au moment de la rupture du contrat de travail. Il permet à celui qui n'a pas pris l'initiative de la résiliation de faire face à la situation qui en découlera, principalement au salarié de trouver un autre emploi et à l'employeur de pourvoir au remplacement du salarié qui s'apprête à quitter l'entreprise.
La date de présentation de la lettre marque le point de départ du préavis de licenciement, qui est le délai s'écoulant entre la notification du licenciement et la fin du contrat. La durée du préavis varie selon l'ancienneté du salarié: elle est au minimum d'un mois de salaire pour une ancienneté comprise entre six mois et deux ans, et de deux mois de salaire pour une ancienneté de deux ans ou plus. Les conventions collectives, les usages et les contrats de travail fixent souvent des durées de préavis et des conditions d'ancienneté plus favorables.
Au cours du préavis, le contrat de travail n'est pas modifié: le salarié doit accomplir ses tâches habituelles dans les conditions habituelles.Le versement d'indemnités.
L'indemnité de licenciement est destinée à compenser le préjudice subi par le salarié du fait de la rupture de son contrat. La loi du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail prévoit que l'indemnité est identique, qu'il s'agisse d'un licenciement pour motif personnel ou d'un licenciement pour motif économique, dès lors que le salarié a atteint un an d'ancienneté. Elle est donc due au salarié en contrat à durée indéterminée, licencié sans avoir commis de faute grave ou lourde, et ayant un an d'ancienneté au service du même employeur. Depuis la loi de modernisation sociale, cette indemnité s'élève à 1/5e de mois par année d'ancienneté; à partir de 10 ans d'ancienneté, elle est augmentée de 2/15e par année d'ancienneté.
Sauf cas de licenciement pour faute lourde, le salarié doit percevoir, en outre, une indemnité compensatrice de congés payés.Les mesures particulières entourant le licenciement collectif pour motif économique
La consultation des instances représentatives du personnel est prévue par la loi pour les licenciements massifs. Les règles diffèrent selon que le licenciement est collectif et pour moins de 10 personnes sur une période de 30 jours, ou collectif et pour au moins 10 personnes sur la même période.
Dans ce dernier cas, la loi prévoit plusieurs réunions avec les délégués du personnel dans les entreprises de moins de 50 salariés, une information des représentants du personnel, la convocation du comité d'entreprise (ou, à défaut, des délégués du personnel) et plusieurs réunions tendant à recueillir les avis et suggestions des représentants du personnel dans les entreprises de 50 salariés et plus.
La protection supranationale des salariés.
L'ouverture des marchés, impliquant la mobilité des salariés, conduit à des délocalisations d'entreprises vers des pays émergents, mais aussi à l'installation en France d'entreprises étrangères créatrices d'emplois.
La relation de travail est protégée non seulement au niveau national mais aussi au niveau international: selon l'Organisation internationale du travail (OIT), tout licenciement doit être motivé. La législation sociale communautaire couvre de son côté des domaines comme la libre circulation des travailleurs, la coordination des régimes de sécurité sociale des travailleurs migrants, la santé et la sécurité sur le lieu de travail, l'outil législatif privilégié dans ces matières étant la directive européenne, qui vise à instituer un socle commun.
Au niveau de l'Union européenne, les mesures se multiplient en vue de la mise en place progressive d'un droit social européen ( directive du 5 juillet 2006 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail). Le dialogue social entre les représentants des travailleurs et les employeurs se développe au sein de l'Union européenne.
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- Le contrôle judiciaire de la rupture conventionnelle.
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